
Pour se faire entendre, une femme a filmé les cris de sa jeune voisine, victime de violences conjugales, samedi 9 février 2019, à Toulouse, et posté la vidéo sur twitter. Avant d’obtenir une réponse des services de l’État (©twitter @sofiasept)
Sa vidéo fera-t-elle bouger les choses ? Sofia a été témoin d’une scène insoutenable, dans la nuit de vendredi 8 à samedi 9 février 2019, à Toulouse. Cette féministe revendiquée, récemment installée dans le quartier de Bellefontaine, a posté sur twitter la scène ahurissante dont elle vient d’être témoin, dans son immeuble : une vidéo où entend les cris désespérés d’une femme, acculée sous les sévices de son conjoint. Des coups et hurlements qui ont duré « trois heures » a indiqué la jeune femme. Des heures qui lui ont paru une éternité.
Coups & hurlements de femme pt 3 h : Mon voisin bat sa femme en toute impunité.
La police passe, et réclame juste 1 pièce d'identité et repart.
C'est normal ? #Toulouse #Bellefontaine. J'attends qu'il y ait un autre #féminicide @prefpolice @PrefetOccitanie @MarleneSchiappa ? pic.twitter.com/TCX8mDuJqO— Sofia OIO (@Sofiasept) February 9, 2019
« On entendait son corps qui heurtait les murs »
Contactée par Actu Toulouse, Sofia détaille la scène dont elle a été témoin la nuit dernière, à l’étage du dessous :
Je viens d’emménager dans cet immeuble. J’étais en compagnie de ma fille et de ma sœur enceinte de 7 mois. Nous avons commencé à entendre des cris aux alentours de 4 heures du matin. Vers 6h30, on entendait son corps qui heurtait les murs et le sol, je n’en pouvais plus d’entendre cela, alors je suis allée sur le pallier. J’ai trouvé une voisine qui m’a expliqué que ça faisait un an que ça durait… Et je suis allée tambouriner à la porte des voisins.
Quelques minutes après, le ton est monté :
L’homme, complètement dingue, m’a ouvert, m’a insulté et a refermé. Et ce à deux reprises. Alors j’ai contacté la police.
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Les coups reprennent après le départ de la police
Selon la jeune femme, les forces de l’ordre sont intervenues dans l’appartement, mais sont reparties « après avoir contrôlé son identité ». Elle poursuit : « Cinq minutes après, ça a repris de plus belle, et de façon encore plus violente… ». Désemparée, ne sachant vers qui se tourner, Sofia n’a trouvé qu’une issue : raconter ce dont elle vient d’être témoin sur twitter, pour essayer de se faire entendre.
Je suis bouleversée ! Quoi faire pour aider cette femme ? Elle halete. J’entends les coups pleuvoir d’ici.
— Sofia OIO (@Sofiasept) 9 février 2019
Je n’ai pas d’autres ressources que de tweeter. La vie de cette femme est en danger. Aidez la ! pic.twitter.com/9Bo4a7zRIG
— Sofia OIO (@Sofiasept) 9 février 2019
Je viens d’appeler la police. Ils ont d’autres choses à faire. Pas leur priorité. Je les supplie, je suis remerciée. Ils ne repasseront pas. Les violences faites aux femmes, la priorité du quinquennat @MarleneSchiappa ? Ou une opération de communication ? @prefpolice
— Sofia OIO (@Sofiasept) 9 février 2019
Le tweet fait le buzz, ministre et préfet lui répondent
Dans une succession de messages, dès 7 heures du matin, la jeune femme a directement interpellé la secrétaire d’État à l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, le préfet de la région Occitanie, Étienne Guyot, le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc…
Et son message a fait le tour du web. Très vite, il a été « retweeté » des milliers de fois. Sofia a reçu le soutien de la twittosphère, et pas seulement des féministes… Résultat des courses : les autorités ont réagi. Après avoir échangé avec le cabinet de Marlène Schiappa en message privé, la préfecture d’Occitanie lui a répondu que l’affaire était « en cours de traitement ».
Le cabinet de M.Schiappa m’a écrit via Twitter.
Je leur ai transmis toutes les infos pour qu’ils puissent agir en toute urgence.L’adjoint à la santé de Toulouse a été aussi prévenu.
— Sofia OIO (@Sofiasept) 9 février 2019
Je viens d’avoir le cabinet du Maire de #Toulouse. Une brigade a été envoyée, avec une proposition immédiate de prise en charge dès ce soir.
La victime a refusé de porter plainte.
J’ai parlé à mes voisins qui sont d’accord pour témoigner.— Sofia OIO (@Sofiasept) 9 février 2019
Intervention de la @PoliceNat31 à deux reprises : affaire en cours de traitement. CC @PoliceNationale @Place_Beauvau
— Préfet de région Occitanie et de Haute-Garonne (@PrefetOccitanie) February 9, 2019
« C’est une jeune fille terrorisée », souffle Sofia
Est-ce que ce sera suffisant pour faire bouger les choses ? Sofia espère simplement que sa voisine trouvera la force de s’extraire de son domicile à temps :
C’est une jeune fille de 22 ou 23 ans. Elle est terrorisée, elle a refusé de porter plainte sous la menace de son conjoint.
Et Sofia de conclure : « Je ne veux pas être témoin d’un féminicide : ni dans mon immeuble, ni nulle part ailleurs. Quoi qu’il advienne, je vais appeler le procureur lundi ». Mais peut-être que d’ici là, l’effet de loupe des réseaux sociaux aura porté ses fruits.