
Gilles Clément, jardinier, paysagiste, botaniste, sera le lundi 11 mars à Loudéac. (©Eric Legret)
« Faire le plus possible avec, le moins possible contre », résume la position du jardinier du Jardin en Mouvement, prônée par Gilles Clément, botaniste, paysagiste, qui animera la conférence organisée par l’Université du Temps Libre le lundi 11 mars à Loudéac, en Bretagne.
Que signifie « Le jardin en mouvement » ?
C’est la prise en compte des dynamiques naturelles du monde vivant. Parmi ces comportements, il y a des déplacements physiques sur le terrain ; surtout les plantes à cycle court qui se disséminent par le vent et les animaux. Il y a des tas d’animaux qui transportent énormément : les petits rongeurs, les fourmis… Les plantes vont réapparaître dans des endroits différents. Même les arbres, les noix, les châtaignes par exemple sont emportées par les écureuils, les geais…
Le jardinier du jardin en mouvement prend en compte ces déplacements, sans s’y opposer… Enfin, on ne peut pas vraiment laisser pousser tout le temps, il faut faire un choix, notamment pour les arbres : c’est là que l’humain intervient.

Le jardin du Musée du Quai Branly dessiné par Gilles Clément. (©Jean-Pierre Dalbéra)
Un jardin idéal ?
Pour vous quel serait le jardin idéal ? Existe-t-il déjà quelque part en France ?
J’ai participé à plusieurs jardins, difficiles de dire si l’un d’eux est le jardin idéal. Il y en a bien un dans le Midi : c’est le Domaine du Rayol, un jardin public où là, effectivement il y a une très bonne équipe de jardiniers.
Tout dépend du jardinier qui laisse venir la diversité : parfois, ce n’est pas très beau et parfois, c’est génial ! Même si ce n’est plus tout à fait aligné…
Et vous êtes-vous aussi investi en Bretagne ?
De façon tellement minuscule… mais, cependant, je suis intervenu dans la remise en scène du Jardin Georges Delaselle sur l’île de Batz au moment de son rachat par le conservatoire du littoral. Il a survécu et est très bien géré grâce à une association.
L’économie de la non-dépense
La permaculture est à la mode. Quelle définition en donneriez-vous et qu’en pensez-vous ?
C’est l’économie de la non-dépense : l’utilisation de la décomposition de la matière organique en matière minérale rendue soluble par la pluie et utilisable au fur et à mesure de la demande des plantes. C’est tout à fait l’opposition à l’engrais soluble, toujours en surdose ; le surplus perdu allant polluer la nature. La permaculture est une manière intelligente de nourrir les plantes. Le paillage est aussi très important.
Trouvez-vous logique que l’on essaie à tout prix de faire pousser des plantes qui ne sont pas adaptées au terrain et au climat ?
C’est une névrose, une mode sans aucun intérêt qui implique une forte consommation d’engrais. Alors qu’on peut toujours trouver une série floristique adaptée à un terrain.
Des « Zadistes » de l’environnement
Vous vous êtes engagé en politique. Pensez-vous donc que les élus ont un pouvoir pour agir sur l’environnement et le respect de la nature ?
Les élus pour lesquels on vote n’ont absolument aucun pouvoir, c’est tragique. Ils sont extrêmement surveillés par le monde de l’économie et de la finance.
Les seuls qui agissent sont ceux qui sont sur le terrain en quelque sorte des « Zadistes » non déclarés.
Moi, je n’ai aucun pouvoir, je dis ce que je pense, je n’ai rien à perdre. On peut si on le veut, mais ceux qui le veulent sont très isolés.
Une « île jardin »
En ce moment êtes-vous sur un projet ?
Je réalise une analyse à la demande des gens qui ont la régie de l’île d’Aix entre Ré et Oléron, pour qu’elle soit une « île jardin » avec une partie livrée à la seule nature et des lieux où le jardinier intervient.
N’est-il pas difficile, voire impossible, de concilier les envies des hommes et la vie de la nature ?
Malheureusement, les humains sont sur la planète, il faut bien qu’ils puissent y vivre… sans tout détruire. Alors essayons et gardons espoir !
Lire aussi : Rencontre à Alençon avec Gilles Clément, porte-parole du jardin planétaire