
Ariel Martell Deulofeu a inauguré son commerce à Corlay l’été dernier.
Des raisons qui ont motivé le départ d’Ariel Martell Deulofeu de l’île caribéenne de Cuba, il ne fera que peu de cas. Il a obtenu en 2006 le statut de réfugié politique.
Cuba no
Sa femme et ses enfants l’ont rejoint en France, mais sa famille est demeurée au pays, ce qui ne le rend guère enclin à « parler de politique ».
De son histoire on peut dire seulement qu’il ne peut pas retourner là-bas sans risquer d’être emprisonné. Les chemins de l’exil l’ont conduit de Cuba à Paris, puis de Paris à Saint-Brieuc pour s’achever à Corlay.
Esprit d’initiative
Né en 1970, Ariel est arrivé en France sans parler un mot de la langue de Molière. Treize ans plus tard, il s’exprime avec aisance et s’est installé à son compte. Fort de son esprit d’initiative et d’une foi inébranlable dans sa force de travail, il a ouvert à l’été dernier son commerce sur la commune de Corlay.
Quand on m’a parlé de la Bretagne la première fois, je croyais que c’était la Grande- Bretagne, l’Angleterre.
Une expérience cubaine de l’agro
A Cuba l’entrepreneur avait porté des projets créateurs d’emplois, à l’époque déjà dans le secteur alimentaire.
« A Cuba je me suis occupé d’une usine de jambon dans la banlieue de la Havane. J’organisais aussi des banquets pour une grosse société pendant le carnaval ».
Quand je suis arrivé en Bretagne, j’ai travaillé dans l’agro-alimentaire, rapidement je suis devenu chef de ligne. Dès le début j’avais le projet de me mettre à mon compte.
I have a dream gringo
L’homme, catholique pratiquant, a au-dessus de son plan de travail une Vierge encadrée. En la désignant du regard, il explique avec la simplicité des croyants : « Un jour j’ai fait une prière, celle d’avoir une maison pour ma famille et moi, et elle a été exaucée ».
Quand, il y a neuf ans j’ai commencé à préparer mon projet de restauration, certaines personnes m’ont demandé ce que je ferai si j’échouais, mais j’ai tout pour réussir, le courage de travailler comme une bête, et la bienveillance de Marie.
Charcuteries cubaines
De Cuba, Ariel n’a pas rapporté avec lui que le catholicisme chatoyant des Caraïbes, il avait aussi dans ces bagages des goûts et des recettes de charcuterie de son île natale. Ainsi pâtés et saucisses sont-ils plus maigres que ce à quoi sont habitués les consommateurs bretons.
Je voulais offrir des produits que l’on ne trouve pas dans le commerce.
Et c’est ainsi qu’on trouve chez Martell : boutifarre, chorizos et autres spécialités de son cru comme l’inédit pâté de foie gras.
« Je cherche à vendre des produits à des prix abordables, issus au maximum d’une production locale. Le foie gras coûte cher, mais le pâté de foie gras lie le goût d’un produit de fête avec un prix accessible à toutes les bourses ».
Une Bretagne grande de cœur
Dans son échoppe, les grands-mères font la queue pour être servies, une clientèle qui revient chaque semaine, augure d’une réussite à venir pour le Cubain qui a découvert la Bretagne comme une Terra Incognita.
Ici j’ai découvert un pays avec des gens accueillants, où on peut faire ses preuves d’où que l’on vienne.
Marée nostrum
En arrivant en Bretagne, Ariel a aussi découvert en bord de mer le phénomène de la marée, inexistant à Cuba.
Et c’est loin des côtes sablonneuses de son île natale que la vague de l’exil l’aura porté, pour autant il n’en est pas le naufragé, mais le navigateur impénitent, sauf peut-être, devant la Vierge…
Oussama Sbaï